Les enchaînés (1946)

Alicia Huberman assiste au procès de son père, reconnu coupable d'espionnage et de sympathie pour le gouvernement allemand. Nous sommes en Avril 1946, les nazis ont pris la fuite en Amérique latine et les services secrets américains décident de recruter cette Alicia pour obtenir des renseignements sur un certain Alex Sebastian, ancienne connaissance de la famille Huberman.

Alicia a une réputation sulfureuse : débauchée, aventurière, sombre alcoolique. Elle n'en demeure pas moins une très belle femme. L'agent chargé de l'embaucher, un dénommé Devlin, tombe sous son charme mais renonce à ses sentiments en apprenant la mission qui attend Alicia. Celle-ci, également éprise de Devlin, accepte d'accomplir les sacrifices qu'on attend d'elle.

Alicia et Devlin deviennent un couple d'amants impossibles, les fameux "Enchaînés" (ou "Notorious"). Ils se plient à la cause patriotique, taisent leurs émotions et pensent donner à leur dévouement une certaine noblesse. En héros romantiques bafoués, ils se posent là ! Leurs renoncements donnent l'ampleur attendue à ce scénario où Hitchcock distille en petites doses les ingrédients du suspense psychologique, sa fameuse recette !

Car ici, le Maître s'attache à mettre en scène la dualité chez ces amants maudits, entre un Cary Grant ténébreux et taciturne et une Ingrid Bergman passionnée et qui se sent indigne de celui qu'elle aime. C'est fatalement superbe ! La démonstration des deux acteurs est d'une grande virtuosité, le génie d'Hitchcock complète la magie. Avec son procédé du zoom actif, la caméra cible les bouteilles de vin ou la tasse de café; ce sont là les indices qui sont donnés au spectateur pour comprendre la menace. Et jusqu'à la dernière minute, effectivement, Hitch réalise un numéro remarquable, sans extrapoler. Il conduit ses personnages vers leur Destin avant de lancer le générique de fin.

Les personnages qui incarnent Alex Sebastian et sa mère, joués respectivement par Claude Rains et Mme Konstantin, sont poignants et bouclent la boucle au scénario un tantinet sombre, tant leurs compositions s'appuient dans un esprit ambigu, si nécessaire à la trame de ce film d'espionnage et de romance.

Les Enchaînés, film d'Alfred Hitchcock (1945) - avec Ingrid Bergman & Cary Grant. Titre vo : Notorious.

Comments

[Clarabel]

C'est vrai que les voix françaises en doublage sont très typées, mais par contre j'aime beaucoup ce côté démodé !
Il n'empêche que rien ne vaut une VO, c'est indiscutable !
Je garde une grande affection pour ce film, je n'arrive pas à me l'expliquer. J'ai conscience que ce n'est pas le meilleur de Hitchcock, et pourtant je trouve que la paire des acteurs m'enchante, et puis l'histoire d'un amour contrarié et le désespoir des amants a quelque chose de boulerversant.
Je n'arrive pas à me l'expliquer autrement !

[fashion victim]

Voilà un film du maître qui ne m'avait pas totalement séduite, mais j'avais pensé sur le coup que c'était à cause du doublage, car je n'avais pas pu le voir en VO. Outre que le doublage me pose un réel problème de musicalité (et ce, quelle que soit la langue d'origine), je trouve que ceux des années 50 étaient atroces parce que les voix françaises étaient très "typées", avec une pointe d'accent parisien et elles sont "démodées"...